Iris et moi sommes partis pour un tour du monde en 400 jours, en empruntant autant que possible des moyens de transports terrestres et maritimes. C’est un projet personnel, mûri de longue date, et qui s’est doublé d’une composante professionnelle quand le BTP CFA Hauts-de-France nous a proposé un partenariat : profiter de notre voyage pour réaliser un reportage sur le btp et l’architecture autour du monde. Deux fois par mois, nous enverrons donc ce « billet du monde », et nous alimenterons régulièrement le compte Polarsteps @Build the world tour qui permettra de suivre notre parcours et de consulter les photos (et leurs légendes) que nous récolterons sur le chemin.
Embarquez donc avec nous pour un tour d’horizon du bâtiment à l’échelle mondiale !
Nous avons décidé de commencer notre voyage par l’Est, et avons ainsi d’abord traversé l’Europe. Forts de nombreux voyages ultérieurs sur notre continent, nous avons pris le parti d’avancer rapidement pour rejoindre l’Asie au plus vite. Grâce à un pass Interrail, nous traversons donc en 10 jours – avec quelques pauses – l’Italie, l’Autriche, la Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie, pour finalement arriver à Istanbul : c’est notre Orient Express !
Cette traversée européenne sera révélatrice d’une réelle uniformité quant à la construction des bâtiments modernes sur le continent, ou en tout cas dans les pays membres de l’U.E. Cette instance supranationale est en effet à l’origine d’une réglementation des règles de construction. Tous les matériaux utilisés doivent par exemple être certifiés « CE » pour « Conformité européenne ». Cela permet de s’assurer de leur qualité et de certaines caractéristiques essentielles telles que la réaction au feu, la transmission thermique ou le comportement acoustique. Ainsi, le degré d’exigence en termes de sécurité, d’écologie, de durabilité ou d’accessibilité est censé s’harmoniser sur l’ensemble du territoire de l’U.E.
Un des effets secondaires immédiats de cette harmonisation des normes de construction est donc une certaine uniformisation des nouvelles constructions et de leur aspect. Les matériaux privilégiés par l’architecture contemporaine sont – partout en Europe – le béton, le verre et l’acier. Les spécificités régionales perdurent heureusement, mais elles s’expriment le plus souvent dans l’habitat individuel (le chalet en bois dans les alpages, la maison de brique dans le nord de l’Europe…).
Ces réglementations européennes sont évidemment jeunes à l’échelle de l’histoire, et le bâtiment est un secteur d’activité qui – comme les autres – a été intégré dans un processus de mondialisation dans la deuxième moitié du XXème siècle. Les édifices antérieurs à cette période nous offrent donc souvent un bel exemple des spécificités architecturales européennes, en fonction des époques, des espaces géographiques et des courants esthétiques.
Ainsi le début du voyage a été marqué par une escale à Venise, et son architecture spectaculaire nous a fait forte impression. La ville, construite sur une lagune grâce à un réseau de pieux en bois enfoncés dans la vase, est unique en son genre en Europe par son implantation si atypique entre terre et mer, mais aussi par son métissage architectural. En effet, la cité s’est développée à la fin du Moyen Âge et a adopté le style gothique qui avait cours à cette époque, mais en y intégrant de nombreuses inspirations byzantines et islamiques. La ville tirant sa puissance économique du commerce, elle est naturellement tournée vers l’espace méditerranéen et emprunte donc au fil du temps différents marqueurs esthétiques et architecturaux aux différentes cultures avec lesquelles elle traite. Il en résulte un ensemble très original que l’on nomme le gothique vénitien.
Plus loin sur notre route, nous traversons l’Europe centrale dont les villes affichent un mélange d’architecture gothique, baroque, néoclassique, art nouveau, avec en supplément une forte présence de l’architecture stalinienne pour les anciens membres du bloc soviétique. Plus nous avançons vers l’Est et plus nous constatons une disparité importante au sein des villes : les centres sont des vitrines, les bâtiments historiques sont bien mis en valeur et on y remarque de nombreux investissements (rénovations, nouvelles constructions au design soigné…), mais les quartiers de la périphérie proche sont quant à eux souvent délaissés, si ce n’est dans un état de délabrement avancé ! Nous pouvons prendre l’exemple de Bucarest, une ville que nous apprécions et dont le centre est aux standards occidentaux, mais dont d’autres quartiers évoquent plutôt certaines villes post-soviétiques d’Asie centrale…
Nous nous y attendons évidemment : le rapport à la sécurité sera fortement différent de celui imposé par nos normes françaises dans bien des pays que nous traverserons ! Nous le constatons d’ailleurs déjà, plus nous avançons vers l’est et plus la sécurité devient une notion toute relative, dans le secteur du bâtiment comme ailleurs (en termes de sécurité routière, nos chauffeurs de bus tiennent le téléphone dans une main et la cigarette dans l’autre, et quand nous prenons le train il roule parfois toutes portes ouvertes !). Loin de nous l’idée de juger les us et coutumes de nos voisins, nous en constatons simplement les différences.
En Europe de l’Est, sur les quelques chantiers que nous avons croisés, le port des EPI était rarement, pour ne pas dire jamais, de mise. Les ouvriers étaient le plus souvent en short et torse-nu, au labeur par 38 degrés ! Il convient tout de même de signaler qu’il s’agissait là de petits chantiers, nous ne sommes pas passés à proximité de travaux de grande ampleur menés par de grosses entreprises (pour lesquelles, comme en France, le port des EPI n’est peut-être pas optionnel…)